Aujourd’hui, un tiers des sociétés immatriculées au RCS sont des sociétés civiles immobilières (SCI). Constituée aussi bien pour la gestion du patrimoine privé que pour l’organisation d’un patrimoine professionnel, la SCI connaît un fort engouement.
Si les avantages qu’elle procure sont certains, il faut toutefois se garder de la présenter comme une solution passe-partout.
Qu’est-ce qu’une SCI ?
Une SCI est un groupement de personnes comportant au moins deux associés, qui a pour vocation la gestion d’un ou plusieurs biens immobiliers dont elle est propriétaire.
Peu importe que les biens soient donnés ou non en location.
Les associés peuvent réserver à leur usage personnel et gratuit les biens détenus par la société.
Dans le cadre de l’entreprise, le choix est souvent fait de constituer une SCI pour loger l’immeuble qui abrite l’exercice professionnel. Dans cette situation, la SCI donne à bail commercial les locaux dont elle est propriétaire à l’exploitant. Un tel montage s’explique principalement pour les raisons ci-après.
Se protéger des créanciers en cas de faillite
En cas d’ouverture d’une procédure collective à l’encontre de l’entreprise locataire, les locaux logés dans la SCI sont protégés du recours des créanciers car ils n’appartiennent pas aux associés mais à la société, ceux-ci n’étant propriétaires que de parts sociales.
Il convient cependant d’être prudent car en cas de prononcé d’une liquidation judiciaire, la protection n’est pas totale soit parce que le liquidateur exige, sur le fondement de l’article 1860 du code civil, l’exclusion de l’associé défaillant et le remboursement de ses parts sociales, soit encore parce qu’il arrive que cette dernière soit déclarée fictive ou qu’il y ait confusion de patrimoine entre la société et ses associés.
Cette situation se rencontre lorsqu’ont lieu des transferts d’actifs sans contrepartie : loyers surévalués, inscription des dépenses et des recettes indifféremment dans les comptes de la SCI ou du locataire, absence de comptabilité et de suivi juridique. Hors ces situations un peu extrêmes, loger l’immeuble professionnel dans une SCI complique le recours des créanciers qui ne peuvent saisir que les parts sociales, ce qui rend leur action beaucoup plus aléatoire.
Créer des charges déductibles pour le locataire
Comparé à l’hypothèse où aucun loyer n’est versé car l’immeuble est détenu en direct, le montage SCI permet au locataire exploitant de réduire son résultat imposable, ainsi que l’assiette de ses cotisations sociales. Mais étant associé de la SCI, si celle-ci relève de l’impôt sur le revenu, le locataire se voit directement imposé sur la quote-part du résultat lui revenant dans la catégorie des revenus fonciers. Ces revenus fonciers viennent s’ajouter alors à ses autres revenus et peuvent donc être lourdement fiscalisés selon la tranche du barème fiscal atteinte pour le calcul de l’impôt.
Il ne faut donc pas penser que la création d’une SCI va permettre de réduire son impôt sur le revenu à moins d’envisager une option à l’impôt sur les sociétés, laquelle n’a pas pour effet de supprimer l’imposition mais seulement de la différer lors de la vente de l’immeuble sur la plus-value ultérieure.
Permettre au chef d’entreprise de se constituer un patrimoine immobilier
Très souvent on fait emprunter la SCI et on la met en mesure de rembourser l’emprunt grâce aux loyers qu’elle reçoit du locataire. Finalement dans ce genre de montage, c’est le locataire exploitant qui va supporter le coût financier de la constitution du patrimoine immobilier que le chef d’entreprise va détenir via la SCI. Attention toutefois dans cette situation à ne pas succomber à la tentation de faire payer un loyer faramineux à l’entreprise locataire pour ne pas tomber dans le danger du loyer surévalué signalé plus haut.
Faciliter le moment venu la revente de l’entreprise
En plaçant les locaux professionnels dans une SCI distincte de l’exploitation commerciale, le chef d’entreprise résout à l’avance de nombreux problèmes et plusieurs possibilités intéressantes s'ouvrent à lui :
- S’il a plusieurs enfants, il peut attribuer son entreprise à celui qui est le plus apte à lui succéder, et donner aux autres les locaux professionnels sous forme de parts de SCI en évitant l’indivision.
- Dans une perspective de vente, l’entreprise est plus facilement cessible car le vendeur n’a pas à redouter une imposition au titre des plus-values sur l’immeuble qui demeure la propriété de la SCI.
- En outre, si l’exploitant décide de conserver ses parts de SCI, il s’assure de cette façon des revenus sous forme de loyers susceptibles de représenter plus tard un appréciable complément de retraite.
Éviter les lourdes conséquences d’une indivision
À défaut de choisir la SCI, lorsque des personnes deviennent propriétaires d’un immeuble à la suite d’un héritage ou d’une acquisition faite en commun, situation d’un couple marié sous un régime de séparation de biens ou d’époux divorcés précédemment mariés sous un régime de communauté, elles se trouvent en indivision.
L’indivision est le mode de propriété collective prévu par le code civil. Or elle n’offre aucune garantie quant à la gestion et à la conservation du patrimoine :
- Toutes les décisions importantes concernant le bien (bail commercial, vente, hypothèque…) doivent être prises à l’unanimité d’où un risque de blocage à l’approche du moindre conflit entre les indivisaires.
- L’indivision est un état précaire car à tout moment chacun des membres peut demander le partage et la vente de l’immeuble, sauf mauvaise foi.
Sans remédier complètement au risque de mésentente, le choix de la SCI garantit la stabilité puisque les décisions y sont prises suivant leur nature soit par le gérant, soit à la majorité des voix. Par ailleurs, si un associé désire se retirer de la société, la SCI peut lui racheter ses parts sans qu’il soit nécessaire de vendre l’immeuble.
Transmettre plus facilement l’immeuble à ses enfants
La SCI est vraiment intéressante pour aider à transmettre un patrimoine immobilier entre plusieurs enfants, en le rendant plus liquide et plus équitable. L’actif global est divisé en parts et chaque enfant en reçoit un certain nombre en pleine propriété ou en démembrement. La donation par les parents à leurs enfants de la nue-propriété de leurs parts sociales leur permet, en conservant l’usufruit, de continuer à percevoir les revenus de l’immeuble tout en anticipant à moindre frais la transmission du bien. En effet, lors du décès des usufruitiers, l’usufruit des parts sociales rejoint gratuitement la nue-propriété pour reconstituer la pleine propriété des titres. De cette façon les droits de mutation à titre gratuit n’auront été acquittés que sur la valeur de la nue-propriété préalablement donnée aux enfants, dont la valeur est inférieure à celle de la pleine propriété des titres.
Par ailleurs, lorsque l’immeuble à transmettre est la propriété d’une SCI qui a contracté un emprunt pour financer l’acquisition, les droits de mutation sont calculés sur la valeur nette des parts transmises en tenant compte du passif existant de la société. Enfin, avec la SCI il est possible de donner l’immeuble en plusieurs fois, par donations successives des parts sociales. L’échelonnement des opérations permet alors de bénéficier plusieurs fois de l’abattement de 100 000 € applicable aux donations réalisées entre parents et enfants, sous réserve de respecter un délai minimum de 15 ans entre chaque donation.
En conclusion on peut affirmer que la SCI est un excellent outil pour optimiser la gestion de son patrimoine, mais il ne s’agit pas d’une panacée. Tout dépend des motivations réelles, de la situation familiale ainsi que la composition du patrimoine.