La vente d’un fonds de commerce est une opération périlleuse pour le vendeur comme pour l'acquéreur.
La vente d'un fonds de commerce : une opération périlleuse
La vente d’un fonds de commerce est une opération périlleuse, pour le vendeur qui doit s’assurer de la solvabilité et de la capacité de l’acheteur ; et pour l’acquéreur qui engage des sommes importantes et qui est susceptible, s’il se libère trop rapidement du prix entre les mains du vendeur, de devoir payer deux fois le prix du fonds de commerce ainsi que les impôts du cédant.
Mais la cession d’un fonds de commerce est susceptible aussi d’affecter les intérêts de beaucoup d’autres personnes, tels que les intérêts des créanciers du vendeur qui devront pour cette raison être informés de la vente ; ceux du personnel attaché au fonds qui doivent de la même manière être informés de l’opération et qui sont susceptibles de proposer au vendeur une offre d’achat ; ceux du bailleur des locaux où est exploité le fonds, qui doit obligatoirement être prévenu de la cession, voire dans certains cas doit donner son autorisation à la cession du bail.
Pour toutes ces raisons, la vente d’un fonds de commerce exige une attention particulière qui oblige à établir dans un premier temps un avant-contrat appelé “compromis de vente” puis, dans un second temps, l’acte de vente définitif.
L'avant-contrat
Pour rédiger cet avant-contrat, les parties ont tout intérêt à consulter un avocat, car une fois leur accord acté, il est difficile d’obtenir pour l’une ou l’autre de revenir sur un ou plusieurs points de cet accord.
L’avant-contrat permet aux parties de procéder à toutes les vérifications nécessaires au bon déroulement de la vente. Il est établi sous réserve de la réalisation d’un certain nombre de conditions suspensives dont, le plus souvent, l’obtention par l’acquéreur d’un prêt destiné à financer l’acquisition : dans ce cas, une copie de l’avant-contrat doit, dès sa signature, être transmise à la banque (aux banques) susceptible(s) de consentir un prêt. En amont, l’acheteur aura dû établir, avec l’aide de son expert-comptable, un plan de financement afin de s’assurer qu’il va pouvoir faire face au remboursement de l’emprunt à souscrire, tout en maintenant son train de vie.
Bien souvent, d’autres conditions suspensives sont insérées, tenant à la production d’un certificat d’urbanisme, la production d’un certificat d’absence d’amiante (et/ou termites) et du DPE, la production d’un rapport établissant la conformité des locaux à l’exercice de l’activité, telle que l’accessibilité des locaux aux personnes handicapées, la conformité aux règles d’hygiène et sécurité, d’incendie, la production de l’absence d’exercice par la commune du lieu de situation du fonds de son droit de préemption…
La période du compromis de vente est aussi l’occasion de vérifier d’autres informations qui devront obligatoirement figurer dans l’acte de cession sous peine de nullité de l’acte : il s’agit de l’origine de propriété du fonds, des inscriptions grevant le fonds, du chiffre d’affaires et des résultats commerciaux des trois derniers exercices et du bail.
L’acquéreur, aidé de son conseil, doit également mettre à profit cette période pour s’assurer des caractéristiques du fonds vendu, tenant à la nature des activités déployées afin de vérifier qu’elles sont en conformité avec la clause destination du bail, au personnel employé dans le fonds dont le(s) contrat(s) de travail doi(ven)t obligatoirement être poursuivis par l’acquéreur, l’amplitude d’ouverture du fonds à la clientèle, la nature des contrats clients et fournisseurs attachés au fonds et la faisabilité de leur transmission à l’acquéreur qui doit être, pour chaque contrat, autorisé par le cédé, la composition et l’estimation du stock de marchandises et de la consigne presse.
Si, à la suite de l’exposition de toutes ces diligences, les parties souhaitent toujours contracter, l’acte de vente définitif est établi.
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L'acte de vente définitif
L’acte de vente définitif reproduit la plupart des clauses contenues dans le compromis, en apportant les précisions complémentaires qui y manquaient (connaissance des privilèges inscrits, renseignements d’urbanisme, valorisation article par article de la liste du matériel, du mobilier et agencements, du stock de marchandises, etc.). Il contient également désignation du séquestre et élection de domicile pour les oppositions.
Dans l’acte de vente définitif, plusieurs points importants doivent être envisagés, par exemple :
- Pour l’acquéreur, une clause de non-concurrence ou de non-rétablissement est indispensable. Elle doit être limitée dans le temps, dans l’espace et dans la nature du commerce.
- Pour le vendeur, il faut prévoir une clause explicite ventilant prorata temporis entre les parties la CET due pour l’année en cours à la date de la vente, ou encore les congés payés acquis par les salariés et non pris à la date d’effet de la vente.
La signature du contrat
Elle intervient une fois que toutes les conditions suspensives ont été réalisées et que l’ensemble des pièces nécessaires à la cession ont été réunies.
Sont conviés à la signature de l’acte le vendeur et son conjoint marié sous un régime de communauté quand le fonds est commun, l’acheteur, mais aussi le bailleur de l’immeuble. Il peut arriver que la présence d’autres personnes soit requise, en fonction de la situation.
Les frais et les droits sont à la charge de l’acquéreur et comprennent : les droits et taxes dus au Trésor Public, les honoraires du rédacteur d’acte, le coût des formalités préalables et postérieures à la signature de l’acte.
Quant au montant des honoraires de rédaction d’acte, il est librement fixé par le rédacteur, avec l’accord de son client.
Les formalités postérieures à la vente
Un grand nombre de formalités doivent être exposées après la cession :
- L’enregistrement de l’acte de cession dans les 15 jours de la cession, accompagné du paiement des droits de mutation,
- Les formalités auprès du CFE, lequel se charge de publier la cession au BODACC pour faire courir le droit d’opposition des créanciers,
- L’inscription des sûretés lorsque le prix n’est pas payé comptant. Le vendeur doit pouvoir compter sur un professionnel qui inscrira le “nantissement” et le “privilège de vendeur” dans les 30 jours de la signature du contrat, sous peine de nullité,
- La notification aux compagnies d’assurance du cédant,
- La signification au bailleur,
- La notification aux créanciers inscrits sur le fonds,
- La mainlevée des inscriptions du chef du vendeur,
- La déclaration de prêt en cas de paiement à terme,
- Le transfert des contrats et créances,
- La déclaration fiscale de cession d’activité du cédant,
- La radiation du vendeur du Registre du commerce et des sociétés.
La remise du prix de vente
La vente d’un fonds de commerce est soumise comme nous venons de le voir à de multiples formalités qui font courir de nombreux délais. En pratique, il est rare que le vendeur puisse recevoir le prix de vente de son fonds avant l’expiration d’un délai minimum de trois mois à compter de la vente. Le plus souvent, il faut attendre beaucoup plus longtemps, c’est ce qui s’appelle la durée du séquestre.
Pour l’acquéreur, remettre le prix au vendeur dès le jour de la signature de l’acte définitif de vente, c’est prendre le risque de devoir payer le prix une deuxième fois aux créanciers opposants, mais c’est aussi s’exposer à devoir régler les impôts directs dus par le cédant au titre de ses bénéfices de l’année et de l’exercice précédant la cession.
La vente d’un fonds de commerce est une opération délicate qui nécessite de procéder à beaucoup de vérifications et de diligences sans lesquelles l’opération peut virer au cauchemar pour les parties.
La prudence commande par conséquent de consulter un avocat avant de se lancer dans l’aventure de la cession, pour lui confier en toute sécurité le bon déroulement de l’opération.