Éclairage sur la responsabilité du dirigeant d’association

Dirigeant de sociétés, vous êtes peut-être aussi membre ou dirigeant d’une ou plusieurs associations à but non lucratif (club de football, association de théâtre amateur, association caritative ou professionnelle…). Si leur fonctionnement vous paraît familier, connaissez-vous les subtilités du régime de responsabilité du dirigeant d’association ?

Faisons le point !

 

Notions à connaître :

Association cultuelle : association régie par la loi de 1905 de séparation entre les Églises et l’État. Elle a un objet ou une dimension religieuse.

Bénéficiaire effectif : personne physique contrôlant une société ou une association.

Dirigeant bénévole : dirigeant d’association non rémunéré.

Mandataire : personne titulaire d’un mandat. Le mandataire de droit commun relève des articles 1984 et suivants du Code civil.

Mandataire social : synonyme de dirigeant de société. Juridiquement, il s’agit d’un régime distinct de celui du mandataire de droit commun.

Sociétaire : membre d’une association.


La loi de 1901 sur les associations évoque peu la responsabilité de leurs dirigeants. En pratique, les tribunaux appliquent un régime de responsabilité très proche de celui des dirigeants de sociétés, avec parfois certaines nuances.

Focus sur des contraintes parfois méconnues

Les dirigeants d’association sont des mandataires : ils peuvent engager leur responsabilité civile, pénale, fiscale ou financière à raison de leurs actes.

Quelle responsabilité du dirigeant d’association sur le plan civil ?

En tant que mandataires de l’association, les dirigeants sont responsables des fautes qu’ils commettent dans leur gestion : il suffit de caractériser une faute, un dommage et un lien de causalité entre la faute et le dommage.

Très souvent, ces fautes sont les mêmes que celles qu’une société pourrait vous reprocher : dépassement de l’objet social de l’association, violation des statuts associatifs, absence de tenue d’assemblée générale annuelle, absence de nomination d’un commissaire aux comptes au-delà de certains seuils, utilisation à des fins personnelles et sur leur temps de travail des salariés de l’association…

Vis-à-vis des tiers, le régime de responsabilité est le même pour le dirigeant d’association que pour le dirigeant de société : vous n’êtes pas responsables des fautes commises lorsque vous agissez au nom et pour le compte de celle-ci, ainsi que dans la limite de vos pouvoirs.

Exception : les dirigeants d’association et de société engagent leur responsabilité civile vis-à-vis des tiers en cas d’infractions pénales intentionnelles (actes de contrefaçon, chèque sans provision, absence d’assurance…). En effet, ces fautes sont détachables de leurs fonctions : elles engagent uniquement la responsabilité des dirigeants de l’association et pas celle de l’association elle-même.

À souligner - une réelle clémence pour les dirigeants bénévoles.

La loi prévoit plus d’indulgence pour les dirigeants d’association bénévoles et en laisse l’appréciation aux juges. Par exemple, a bénéficié de cette clémence un président bénévole de club de football qui avait oublié de verser les cotisations sociales de l’entraîneur salarié, empêchant sa veuve de bénéficier d’une pension de réversion : sa responsabilité n’a pas été retenue.

Attention : l’indulgence ne concerne que l’appréciation de la faute et non l’étendue de la réparation.

Cette indulgence ne s’applique pas aux dirigeants d’association rémunérés.

Par conséquent, l’appréciation de la responsabilité en association est très différente par rapport aux sociétés, où aucune distinction n’est faite entre dirigeants bénévoles et rémunérés.

Cela se confirme aussi en matière de mise en cause : contrairement aux associés, les sociétaires ne peuvent pas mettre directement en cause les dirigeants. Ils doivent demander au juge la nomination d’un administrateur ad hoc qui pourra agir au nom de l’association.

L’objectif de ces mesures est indéniablement d’encourager l’engagement associatif en évitant de dissuader les acteurs.

Quelle responsabilité du dirigeant d’association sur le plan pénal ?

Le dirigeant d’association peut engager sa responsabilité pénale dans les mêmes cas qu’un dirigeant social :

  • abus de confiance,
  • détournement de fonds ou escroquerie,
  • faux et usage de faux (ex : rédaction de procès-verbaux de l’assemblée générale altérant la vérité et citant des personnes n’ayant jamais participé à cette réunion),
  • manquement à une obligation légale ou règlementaire, notamment l’obligation de sécurité du personnel de l’association ou des sociétaires (ex : non-rappel des règles de sécurité indispensables par le président d’une association de chasse lors d’une battue avec tir à balles),
  • exercice illégal d’une profession …

On relèvera particulièrement l’obligation de déclarer les bénéficiaires effectifs. Elle ne concernait que les dirigeants de sociétés, civiles ou commerciales, et d’associations inscrites au registre du commerce et des sociétés (RCS). Depuis le mois d’avril 2024, elle s’applique à toutes les associations ; les dirigeants d’associations doivent désormais déclarer au répertoire national des associations (RNA) :

  • soit la personne physique contrôlant l’association ;
  • soit celle pour laquelle une opération est effectuée ou une activité exercée ;
  • à défaut, le dirigeant de l’association lui-même.

Par ailleurs, quelle que soit la structure, le manquement à cette obligation est puni, pour une personne physique, de 7 500 euros d’amende et de six mois d’emprisonnement. Une interdiction de gérer – une société ou une association – peut aussi être prononcée par le juge.

À savoir : le statut bénévole du dirigeant ne réduit absolument pas sa responsabilité pénale. D’un autre côté, le mécanisme des délégations de pouvoirs, qui permet d’exonérer le dirigeant de sa responsabilité pénale dans certaines conditions, fonctionne de la même manière en société ou en association.

Attention aux infractions spécifiques !

L’article 8 de la loi de 1901 prévoit quelques cas particuliers de mise en cause de la responsabilité pénale des dirigeants d’association :

  • le fait de ne pas déclarer, dans un délai de trois mois, les modifications statutaires et les changements intervenus dans les organes d’administration et de direction de l’association. Pour le dirigeant de société, il ne s’agit que d’un cas de responsabilité civile ; les dirigeants d’associations risquent une amende de 1 500 euros, et 3 000 euros en cas de récidive ;
  • le maintien ou la reconstitution, illégalement, d’une association dissoute par décision de justice, ou bien la facilitation de la réunion de ses membres malgré la dissolution. C’est une hypothèse originale qui n’a pas d’équivalent en droit des sociétés : elle est punie de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.

De plus, pour les associations cultuelles, la loi de 1905 prévoit d’autres infractions, punies – pour les dirigeants - soit d’une amende de 1 500 euros (3 000 euros en cas de récidive), soit d’une amende de 9 000 euros.

Exemples : violation du minimal requis de sept membres majeurs pour constituer l’association, non-déclaration d’avantages ou de ressources de source étrangère, non-tenue de l’état inventorié des meubles et immeubles…

Infractions financières

Les dirigeants d’associations subventionnées par des fonds publics (État, Union européenne …), ou faisant appel à la générosité du public, ou délégataires de service public

  • par exemple, une micro-crèche associative bénéficiant d’une délégation de service public
  • sont également soumis au contrôle de la Cour des Comptes.

Elle peut leur reprocher :

  • une gestion de fait ;
  • l’attribution d’un avantage injustifié, à soi, à autrui, ou à une personne morale, en méconnaissance de ses obligations et par intérêt personnel ;
  • des agissements manifestement incompatibles avec les intérêts de l'association ;
  • ou des infractions aux règles relatives à l'exécution des recettes et des dépenses ou à la gestion des biens révélant une faute grave.

Pour les deux dernières infractions, l’infraction ne sera retenue qu’à la condition qu’un préjudice financier significatif ait été causé.

Toutes ces infractions peuvent être sanctionnées par une amende égale à six mois de rémunération annuelle lorsque le dirigeant est rémunéré ; pour le dirigeant bénévole, le calcul du montant de l’amende obéit à des règles différentes.

En pratique, ce régime ne s’applique que rarement aux dirigeants de sociétés ; il est en revanche bien plus souvent invoqué vis-à-vis des dirigeants d’association.

Par conséquent, si vous dirigez une association, assurez-vous d’être bien informé pour éviter une mise en cause accidentelle regrettable.

Quelle responsabilité du dirigeant d’association sur le plan fiscal ?

Fiscalement, le dirigeant d’une société ou d’une association engage sa responsabilité en cas de manœuvres frauduleuses ou de l'inobservation grave et répétée des obligations fiscales rendant impossible le paiement des impôts (droits d’enregistrement, TVA, taxe sur les salaires…).

Il s’agit d’une responsabilité solidaire, ce qui veut dire que le fisc peut vous demander de régler l’ensemble des sommes, charge à vous de vous retourner contre la structure que vous dirigez.

Et enfin sur le plan financier ?

Le dirigeant d’association est responsable des dettes de l’association qu’il a cautionnées ou en cas de procédure collective de sa structure, dans certaines circonstances.

Attention : sauf clause contraire du contrat de cautionnement, la cessation des fonctions du dirigeant de l’association ne met pas fin à son obligation.

Il convient donc pour les dirigeants d’association d’être vigilant aux potentielles implications financières.

 

En synthèse, la responsabilité des dirigeants associatifs est réelle, bien que dans les faits, les tribunaux les condamnent assez peu, surtout s’ils sont bénévoles. Des outils existent pour organiser ou limiter leur responsabilité : statuts, délégations de pouvoirs, clauses du contrat de cautionnement…  Le cabinet FIDUCIAL Sofiral Avocats est à vos côtés pour vous conseiller et vous accompagner.

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