Tout dirigeant cherche naturellement à protéger son patrimoine personnel, car toute entreprise comporte un risque.
Il existe plusieurs solutions pour permettre cette protection :
- bénéficier des dispositions applicables à l'entrepreneur individuel,
- choisir un contrat de mariage approprié,
- protéger ses biens immobiliers privés des éventuelles saisies des créanciers professionnels,
- lorsque cela est possible, donner des garanties limitées.
Malheureusement, il apparaît que ces aspects patrimoniaux sont souvent mal connus des entrepreneurs. Idéalement, il conviendrait de mettre en place des mesures protectrices dès la création de l’entreprise, mais il n’est jamais trop tard pour le faire en cours de vie de l’entreprise.
Le nouveau statut de l’entrepreneur individuel
La loi du 14 février 2022, dont l’objectif était de protéger l’entrepreneur et son patrimoine personnel, a instauré un nouveau statut de l’entrepreneur individuel de droit.
Ce statut se caractérise par une séparation entre le patrimoine professionnel (biens utiles à l’activité professionnelle) et le patrimoine personnel (les autres biens). Une liste exemplative existe (fonds de commerce, bail commercial, clientèle, marchandises, outillage, immeubles servant à l’activité…). De plus, une présomption de professionnalité est créée en faveur des biens présents en comptabilité. L’idée forte de ce statut est que seuls les créanciers personnels peuvent obtenir le règlement de leurs créances sur le patrimoine personnel (résidence principale etc.). Les créanciers professionnels ne peuvent saisir que le patrimoine professionnel.
Attention toutefois, des exceptions existent, notamment en faveur du Trésor et de l’URSSAF !
À l’heure actuelle, ce nouveau statut contient de nombreuses zones d’ombre juridiques et fiscales ; par exemple, les textes n’abordent ni la question des biens à usage professionnel et non-professionnel (ex : voiture, ordinateur portable…) ni la question des biens possédés par plusieurs personnes (biens communs, indivis…). Fiscalement, la possibilité pour l’entrepreneur individuel d’opter pour l’imposition à l’impôt sur les sociétés (IS) comporte certains écueils.
De manière générale, nous recommandons d’établir clairement un inventaire des biens professionnels, personnels, communs, mixtes, indivis… avec le comptable et/ou l’avocat, et de le tenir à jour.
Nos recommandations La séparation des patrimoines de l'entrepreneur individuel à des conséquences juridiques, fiscales et comptables. Par ailleurs, l'option pour l'impôt sur les sociétés en cours de vie de l'entreprise peut avoir des incidences comparables à celles d'une mise en société et modifie la base de calcul des cotisations sociales. Par conséquent, cela conduit à déconseiller ce statut dans certains cas. Rapprochez-vous de votre conseiller FIDUCIAL et/ou votre avocat FIDUCIAL SOFIRAL pour étudier le statut le mieux adapté à votre situation. |
Un régime matrimonial approprié
Aucun chef d’entreprise ne souhaite voir son conjoint poursuivi par ses propres créanciers. Ce risque existe dans tous les régimes communautaires. En particulier le plus répandu d’entre eux, celui que l’on adopte quand on se marie sans avoir fait de démarche spécifique : le régime de la communauté réduite aux acquêts.
Dans ce régime dit « légal » par opposition aux autres régimes dits « conventionnels », car adoptés par contrat de mariage devant notaire, chaque époux conserve la propriété des biens qu’il a acquis avant le mariage, mais aussi de ceux qui lui seront donnés ou dont il héritera pendant le mariage. Les biens acquis pendant le mariage par les époux, conjointement ou séparément, sont communs aux deux époux.
Lorsqu’une dette a été contractée par un seul des deux époux, elle engage les biens de la communauté et ses biens propres à l’exclusion des biens propres de son conjoint sauf s’il se porte lui-même caution ou co-emprunteur solidaire.
Cependant, si les époux jugent insupportable l’idée qu’un risque pèse sur eux, si minime soit-il, alors la séparation de biens pure et simple peut mieux leur convenir (sous réserve que le conjoint du chef d’entreprise ne se porte pas caution de ce dernier). Cependant, en cas de divorce, un époux ne possédant pas de patrimoine et n’exerçant pas de profession séparée peut se retrouver totalement démuni.
Il existe un troisième type de régime qui tend à se développer, celui de la participation aux acquêts. Ce régime tente de concilier les avantages de la séparation de biens (pendant le mariage) et de la communauté (à la fin du mariage). Les époux sont personnellement propriétaires des biens acquis avant et pendant le mariage, ainsi que de ceux dont ils ont hérité.
Ce qui se mesure plus tard et se partage, c’est l’enrichissement de chacun le temps du mariage.
Nos recommandations Consultez votre notaire, il sera d'un précieux conseil |
Protéger ses biens immobiliers non professionnels
- Depuis août 2015, la résidence principale de tout entrepreneur individuel est protégée de plein droit contre les poursuites des créanciers professionnels. Ainsi, elle est à l’abri des saisies pour des dettes professionnelles sans déclaration préalable ni formalité. Si la résidence principale est utilisée à usage mixte, l’insaisissabilité est cantonnée à la partie non professionnelle.
Attention : L’insaisissabilité de plein droit de la résidence principale s’applique pour les dettes professionnelles nées après le 7 août 2015.
- Quant aux autres biens immobiliers de l’entrepreneur, ils peuvent faire l’objet d’une insaisissabilité à condition qu’ils ne soient pas affectés à son activité professionnelle. Mais contrairement à la résidence principale, cette protection n’est pas automatique. Elle nécessite que l’entrepreneur fasse rédiger par un notaire une déclaration d’insaisissabilité, qui est publiée au service de publicité foncière.
L’insaisissabilité ne s’applique qu’aux créances nées après cette publication.
Remarque : en principe, ces biens immobiliers non-professionnels seront automatiquement protégés des créanciers professionnels de l'entrepreneur individuel, grâce à la séparation des patrimoines. Dans la pratique, une déclaration d'insaisissabilité permettra de démontrer que ces biens ne sont pas utiles à l'activité professionnelle.
- La protection de la résidence principale et des autres biens immobiliers privés ne concerne que les entrepreneurs individuels ; en sont exclus les dirigeants et associés de société. De plus, elle ne s’applique pas si le bien immobilier est détenu par le biais d’une SCI (société civile immobilière). Enfin, l’insaisissabilité n’est pas opposable aux créanciers non professionnels. La protection voulue par la loi se heurte souvent en pratique aux exigences des organismes prêteurs qui, lors de la création de l’entreprise, demandent généralement une garantie portant sur l’immobilier. Il est d’ailleurs prévu que l’entrepreneur puisse y renoncer, au profit de tous ses créanciers ou de l’un d’entre eux seulement.
Donner des garanties limitées
Celles-ci peuvent être de deux natures : personnelles ou réelles. Selon l’hypothèse retenue, la prise de risque ne sera pas la même.
Lorsque le statut d’entrepreneur individuel s’applique, il est fréquent qu’on demande au chef d’entreprise de renoncer à la séparation entre ses patrimoines personnel et professionnel. Les créanciers pourront alors exiger le règlement de leurs créances à la fois sur les biens professionnels et personnels de l’entrepreneur individuel.
Lorsque l’entreprise est exploitée sous forme de société, la garantie la plus fréquemment utilisée est celle du cautionnement personnel et solidaire du dirigeant.
Avantage : il est rapide à mettre en place et il n’est pas cher.
Inconvénient : il est dangereux, car la caution expose alors tout son patrimoine.
De leur côté, les garanties réelles présentent moins de danger : elles sont cantonnées au bien sur lequel elles s’exercent. Le créancier se trouve alors placé en possession du bien ou bénéficie d’un droit de suite. Parmi les garanties réelles, il y a l’hypothèque, le nantissement ou le gage.
- L’hypothèque permet au créancier, en cas de non-paiement, de faire saisir le bien immobilier, puis d’obtenir en justice la vente de l’immeuble. La banque qui a prêté les fonds pourra alors être payée sur le prix de vente aux enchères publiques par préférence aux autres créanciers. L’hypothèque est coûteuse, en raison de la publicité foncière à laquelle elle est soumise. Elle est lourde à manier pour la constituer ou pour fermer le dossier. En outre, sa mise en œuvre est longue, compte tenu de la procédure à mettre en place si le débiteur ne paie pas.
- Le gage est une garantie qui porte sur un bien corporel qui n’est pas immobilier.
Lorsque ce bien est incorporel (créances, parts sociales...), on parle de nantissement.
L’acte de prêt n’a pas besoin d’être régularisé devant un notaire. C’est pourquoi ces sûretés remportent davantage de succès.
Mais que peut-on offrir comme autre garantie ? Ne vous inquiétez pas, votre banquier a de l’imagination :
- des outils,
- des marchandises,
- un compte titres,
- un contrat d’assurance-vie…
Les sociétés de cautionnement mutuel (SCM)
Les SCM sont des organismes financiers qui facilitent l’accès au crédit des petites entreprises en apportant leur garantie aux banques. En cas de défaillance de l’emprunteur, c’est la SCM qui règle directement la banque.
Il existe différentes SCM couvrant différents secteurs d’activités : SIAGI (artisanat et commerce), SOCAMA (artisanat, commerce, professions libérales).
Les SCM sont souvent affiliées à des banques (par exemple, la Banque Populaire pour la SOCAMA). Passer par leur intermédiaire est parfois une condition obligatoire pour obtenir un prêt d’une banque.
L’emprunteur doit verser à la SCM, dès le déblocage des fonds, une contribution proportionnelle au montant de son prêt, composée :
- d’une cotisation à un fonds mutuel de garantie (qui pourra lui être en partie reversée à la fin de son crédit s’il n’y a eu aucun incident),
- d’une commission qui est définitivement acquise par l’organisme.
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