Oui : l'ordonnance du 22 septembre 2017 a ouvert la possibilité pour les TPE de conclure des accords d'entreprise directement avec le personnel en l'absence de toute représentation du personnel.
Qu’est-ce qu'un accord d’entreprise et sur quoi peut-il porter ?
Pour le dirigeant, l’accord d’entreprise est un outil de gestion très efficace. Il permet en effet d’organiser la vie de l’entreprise, en posant un cadre ou en adaptant les règles existantes tout en prenant en compte les avis de ses salariés. Et pour ces derniers, c’est une occasion d’être impliqués dans des choix les concernant au premier chef (ne pas subir une organisation, mais contribuer à son élaboration).
Il s’agit d’un accord collectif d’une durée déterminée ou indéterminée qui pourra porter sur la rémunération, la durée et l’organisation du travail, les heures supplémentaires, les congés, l’intéressement, l’épargne salariale, les primes, la mobilité professionnelle ou géographique, les tickets restaurant etc.
Or, vous savez qu’une entreprise, soumise à la loi, est également tenue à l'application d'une convention collective. Celle-ci peut être soumise à des dispositions signées entre les partenaires sociaux, c’est à dire des accords de branche portant notamment sur les conditions d’emploi et de travail, salaires minima, classifications, durée du travail, aménagement horaires, CDD, égalité homme femme, période d’essai qui font parties des 13 matières qui ont l’obligation d’être garanties par un accord de branche.
Désormais, l'entreprise est le lieu privilégié de la négociation collective, où s'élaborent les règles régissant les rapports entre les salariés et l'employeur. Cet accord est un outil supplémentaire à la disposition de l’entreprise, entre le contrat de travail, négocié mais toujours individuel, et l’acte unilatéral de l’employeur, à visée collective mais ne reposant pas sur la négociation.
Alors dans quels cas l’accord d’entreprise s’impose aux autres normes ?
Ces 13 matières garanties par un accord de branche s’imposent aux accords d’entreprise sauf si ces derniers sont plus favorables ou proposent des garanties au moins équivalentes.
L’accord d’entreprise s’imposera sur tous les autres thèmes, à savoir notamment : la durée et l’organisation du travail, les congés, les heures supplémentaires, les primes, la mobilité professionnelle ou géographique, la préservation ou le développement de l’emploi.
Exemples concrets : en l'absence d'accord d'entreprise, c'est l'accord de branche qui s'applique naturellement. Un accord d'entreprise peut prévoir une indemnité de licenciement moins importante que celle prévue par l'accord de branche à condition toutefois de respecter les planchers fixés par la loi. L’accord d’entreprise pourra aménager la durée du travail, la rémunération dans le respect du smic et des salaires minimaux conventionnels hiérarchiques, fixer les conditions de la mobilité professionnelle et géographique au sein de l'entreprise.
Quelles sont les modalités pour négocier cet accord d’entreprise ? Majorité des 2/3 des salariés
L’accord d’entreprise a été conçu pour être facile à mettre en place dans les entreprises les plus petites.
Les entreprises de moins de 11 salariés (et celles de 11 à 20 salariés en l'absence d'élus), peuvent proposer directement aux salariés un projet d'accord pouvant porter sur l'ensemble des thèmes ouverts à la négociation d'entreprise.
Les modalités d'organisation de la consultation sont définies par l'employeur et portent sur :
- les modalités de transmission aux salariés sur projet d’accord rédigé par l’employeur,
- le lieu, la date et l'heure de la consultation,
- l'organisation et le déroulement de la consultation,
- le texte de la question relative à l'approbation de l'accord soumis à la consultation des salariés.
Ces modalités sont communiquées à l’ensemble des salariés de l’entreprise 15 jours au moins avant la consultation en même temps que le projet d'accord soumis à leur approbation.
Pour être considéré comme valide, le projet d'accord doit être approuvé à la majorité des 2/3 du personnel.
La consultation doit s'effectuer dans les conditions matérielles fixées par le décret, en dehors de la présence de l’employeur par tout moyen et pendant le temps de travail. Le caractère personnel et secret de la consultation doit être garanti.
A l'issue de la consultation, le résultat est porté à la connaissance de l'employeur et fait l'objet d'un procès-verbal dont la publicité est assurée dans l'entreprise par tout moyen (ex : affichage). Ce procès-verbal est annexé à l'accord approuvé lors du dépôt de ce dernier. Il fait également l'objet d'une publicité externe de deux manières : une obligation d’un dépôt en ligne, afin de lui donner force obligatoire, et un dépôt auprès du conseil des prud’hommes dont relève l'entreprise.
Les conditions de sa réussite
Négocier un tel accord est en soi un projet d’entreprise. Il donne l’occasion à son dirigeant d’adopter une posture constructive qui peut être motivante pour ses équipes. Afin que le projet aboutisse, plusieurs conditions doivent être réunies.
La première est de faire une présentation complète du projet. En effet, un accord d’entreprise est un outil permettant d’atteindre un objectif (saisonnalité de l’activité, égalité hommes/femmes, télétravail…). Il faut donc expliquer la démarche pour lever la suspicion.
Ensuite, les termes de la négociation doivent être clairement posés et permettre à celle-ci de déboucher sur un donnant-donnant acceptable par la majorité. Ce que chacun y gagne doit être connu et rien ne doit être caché. Il s’agit de développer le capital confiance de l’entreprise auprès de ses salariés.
Enfin, il est nécessaire pour le dirigeant de s’engager dans la négociation en ayant les moyens de désamorcer les raisons d’un éventuel rejet. Cela passe donc par une phase préalable d’écoute des attentes et des besoins afin d’être en mesure d’apporter des propositions en rapport.
Un accord d’entreprise permet donc de poser ou d’officialiser certaines pratiques spécifiques à l’entreprise. Il est d’autant plus intéressant pour le dirigeant qu’il reste réversible : il est en effet habituel d’insérer une durée de validité pour l’accord et de prévoir une clause de revoyure. Alors que le marché de l’emploi devient de plus en plus concurrentiel, c’est un moyen de se différencier, par exemple sur l’organisation du télétravail, tout en se préservant une porte de sortie.
Une procédure en cas de litige ? Un salarié peut-il refuser un accord d’entreprise ?
En cas de contestations relatives à la liste des salariés devant être consultés et à la régularité de la procédure de consultation, le tribunal d'instance peut être saisi, la décision rendue en dernier ressort est susceptible d'un pourvoi en cassation.
Les dispositions d’un accord d’entreprise s’imposent aux dispositions prévues dans tout contrat de travail notamment relatives à la rémunération et à la durée du travail.
Un salarié est donc en droit de refuser toute modification de son contrat de travail. Pour cela, il dispose d’un mois pour faire connaître son refus explicite et écrit à son employeur à compter de la date à laquelle l’accord a été mis à la connaissance des salariés. L’employeur peut le licencier pour cause réelle et sérieuse.
Il convient de noter que le salarié ne pourra contester son licenciement qu’en cas de non-respect des règles de procédure !!!