La première loi de finances du second quinquennat d’Emmanuel Macron n’est pas très ambitieuse. Elle s’inscrit dans la continuité des lois précédentes. À cela s’ajoute l’utilisation des dispositions de l’article 49.3 de la Constitution qui a conduit à la « disparition » pure et simple de nombreux articles proposés et adoptés par les parlementaires de tous bords. Au final, le texte comprend essentiellement une collection de mesures, souvent d’ampleur limitée, mais aucune réforme importante, à l’exception peut-être de la suppression, en deux ans, de la Cotisation sur la Valeur Ajoutée des Entreprises (CVAE).
LES PRINCIPALES MESURES QUI CONCERNENT LES ENTREPRISES
1.1 - La revalorisation du plafond applicable au taux réduit d’impôt sur les sociétés (IS)
Sous certaines conditions, les entreprises (essentiellement les sociétés pour l’instant) peuvent bénéficier d’un taux réduit d’IS à 15 %. Le montant du bénéfice éligible à ce taux réduit est plafonné pour chaque exercice. Au-delà de ce plafond, le taux d’IS passe à 25 %.
Depuis, la mise en place de ce taux réduit de 15 % (avant le passage à l’euro), le plafond n’avait jamais été réévalué. Il était temps de l’actualiser.
Pour les exercices clos à compter du 31 décembre 2022, le taux réduit d’IS de 15 % s’applique donc jusqu’à 42 500 € de bénéfice (au lieu de 38 120 €).
1.2 - La suppression en deux ans de la Cotisation sur la Valeur Ajoutée des Entreprises (CVAE)
C’est la principale mesure de cette loi de finances. Les entreprises dont le chiffre d’affaires dépasse 500 000 € sont redevables, tous les ans, d’une CVAE. Sans entrer dans les détails, en dessous de 500 000 € de chiffre d’affaires, l’entreprise est exonérée de cette imposition.
Dans une volonté de réduire les « impôts de production », le Gouvernement a décidé sa suppression en deux ans. Par conséquent, le taux de la CVAE 2023 est divisé par deux. Cela concerne aussi bien le calcul des éventuels acomptes (de juin et septembre 2023), que celui du solde 2023 à payer fin avril 2024.
En 2024, une fois ce solde 2023 payé, la CVAE disparaîtra.
Cette CVAE constitue l’une des deux composantes de la Contribution Economique Territoriale (CET). Avec sa suppression, seule va subsister la Cotisation Foncière des Entreprises (CFE) dont le régime est très peu modifié. Cette CFE est une imposition pesant sur les valeurs foncières et immobilières.
Les très petites entreprises sont plus souvent redevables de la CFE que de la CVAE qui va être supprimée. Pour elles, cette réforme ne devrait rien apporter.
1.3 - Deux crédits d’impôt propres aux entreprises sont prorogés ou rétablis.
Cela concerne :
- Le crédit d’impôt formation des chefs d’entreprise. Il devait s’éteindre au 31 décembre 2022 mais est finalement prorogé de deux ans, jusqu’au 31 décembre 2024. Pour rappel, il est octroyé aux chefs d’entreprise qui suivent certains types de formations. Il est limité à 40 heures de formation par an. Le montant horaire du crédit d’impôt (égal normalement au taux horaire du Smic) est multiplié par deux pour les petites entreprises.
- Le crédit d’impôt pour dépenses de rénovation énergétique des bâtiments à usage tertiaire. Cet avantage fiscal avait disparu en 2022. Il est rétabli pour deux ans, jusqu’au 31 décembre 2024.
Pour rappel, il est égal à 30 % des dépenses de rénovation énergétique engagées par l’entreprise. Un plafond global et unique de 25 000 € est prévu sur l’ensemble des deux périodes d’application (2020-2021 puis 2023-2024). Les entreprises qui ont déjà utilisé leur plafond de crédit d’impôt sur la période 2020-2021 ne pourront donc pas renouveler l’opération sur la nouvelle période 2023-2024.
1.4 - Réforme du champ d’application du taux réduit de TVA (5,5 %) applicable aux travaux de rénovation énergétique dans les logements
La loi de finances entend redéfinir la liste des travaux de rénovation énergétique éligibles aux taux de TVA de 5,5 %. Le champ d’application de cette mesure devenait « obsolète ».
La mesure n’a pas un effet immédiat. En effet, un décret doit fixer une nouvelle liste de ces travaux. La nouvelle règle entrera en vigueur lors de la publication de ce décret, dans le courant de l’année 2023.
Il est plus que probable que certaines dépenses seront exclues du taux réduit, à commencer par l’ensemble des chaudières fonctionnant aux énergies fossiles.
À noter également que l’application du taux réduit de 5,5 % est confirmée pour les travaux de pose, d’installation et d’entretien des bornes de recharge pour véhicules électriques installées dans les logements.
1.5 - Modification du calcul des droits d’enregistrement en cas de cession d’une entreprise individuelle qui a opté pour l’impôt sur les sociétés (IS)
L’an dernier, le Parlement a adopté une mesure permettant aux entreprises individuelles de se placer, par option, sous le régime fiscal de l’impôt sur les sociétés.
Ce régime est entré en vigueur en mai 2022 mais pose toujours de réelles difficultés sur le plan fiscal et comptable.
L’une de ces difficultés concernait les droits d’enregistrement applicables en cas de vente de l’entreprise. Pour y pallier, la loi de finances précise que les droits applicables sont ceux propres aux cessions de parts sociales (et pas aux cessions de fonds de commerce).
Dès lors, le taux d’imposition applicable est désormais de 3 %, après application d’un abattement de 23 000 €.
Malheureusement, cette retouche du régime est loin de régler les nombreux problèmes inhérents à ce nouveau statut fiscal.
II. LES PRINCIPALES MESURES QUI CONCERNENT LES PARTICULIERS
2.1. - Augmentation du plafond de déficit foncier pouvant être déduit des autres revenus du contribuable
Jusqu’à présent, un bailleur qui réalise des déficits sur son activité locative immobilière ne peut pas forcément les déduire intégralement de ses autres revenus. Cette déduction est plafonnée à 10 700 € par an.
Si le déficit excède ce montant, le surplus ne pourra être déduit que des futurs revenus locatifs fonciers, dans un délai de 10 ans.
Par ailleurs, depuis le 1er janvier 2023, des restrictions/interdictions s’appliquent à la location des logements qualifiés de « passoires thermiques ».
Pour accompagner les bailleurs dans les inévitables travaux d’amélioration de performance énergétique qu’ils vont devoir réaliser dans certains logements, la loi de finances rectificative pour 2022 porte le plafond de déduction des déficits fonciers à 21 400 € par an.
Attention, ce doublement ne s’applique que si le déficit foncier provient de travaux d’amélioration de la qualité énergétique. Il faut également que ces travaux permettent au logement de passer du statut de « passoire énergétique » (classe énergétique : E, F ou G) à un classement compris entre A et D. Cela suppose de bien réaliser un diagnostic avant les travaux et après les travaux.
2.2. Simplification de la modulation à la baisse du prélèvement à la source (PAS)
Jusqu’alors, pour obtenir une baisse du montant du prélèvement à la source (PAS), il fallait que l’estimation des revenus permette de constater un écart d’au moins 10 % entre le prélèvement prévu et le prélèvement estimé par le contribuable.
Pour faciliter les demandes de baisse du PAS, la loi de finances réduit à 5 % cet écart. Il sera donc plus aisé de demander une réduction du prélèvement en cours d’année en cas de baisse prévisible des revenus du foyer fiscal.
Attention tout de même à l’estimation des revenus de l’année car une baisse injustifiée du prélèvement peut bien évidemment conduire à l’application de pénalités.
2.3. Quelques modifications au niveau des réductions et des crédits d’impôt
Plusieurs retouches sont apportées à des mécanismes de réductions et de crédits d’impôt :
- Le plafond du crédit d’impôt pour frais de garde d’enfant (de moins de 6 ans) est augmenté. Il passe à 3 500 € (au lieu de 2 300 €). Son taux étant de 50 %, l’augmentation du plafond peut générer un avantage fiscal supplémentaire maximum de 600 € par rapport à l’année précédente.
Cette mesure s’applique aux revenus 2022. Les contribuables pourront donc en bénéficier dès les prochaines déclarations.
- Les contribuables qui ont recours aux services d’un salarié à domicile devront désormais préciser la nature des travaux réalisés sur leur déclaration. Cela doit permettre à l’administration de mieux contrôler les différents plafonds applicables. En effet, si le plafond global de ce crédit d’impôt se monte à 12 000 €, il existe plusieurs « sous-plafonds » de moindres montants (500 € pour les travaux de « petit bricolage », 5 000 € pour les petits travaux de jardinage et 3 000 € pour les prestations d’assistance informatique).
Cette nouvelle obligation déclarative s’applique dès les revenus 2022 et donc pour les déclarations déposées en mai 2023.
- Le crédit d’impôt en faveur des systèmes de charge pour véhicules électriques dans les habitations est prorogé jusqu’au 31 décembre 2025 (au lieu de s’éteindre le 31 décembre 2022).
Pour rappel, son montant est égal à 75 % de la dépense dans la limite de 300 € par système de charge.
Comme précisé au début de cet article, pas de révolution fiscale cette année. Il y a bien d’autres mesures adoptées mais elles sont souvent très spécifiques, voire locales, ou correspondent à des ajustements techniques voire simplement rédactionnels.