Peu nombreux sont les chefs d’entreprise à préparer et organiser leur succession, estimant cette démarche prématurée. Selon les statistiques, moins d'un entrepreneur sur deux prend ses dispositions à l'avance pour transmettre son entreprise.
L’absence de préparation d’une succession peut aboutir à la liquidation de l’entreprise (d’ailleurs 15 % des disparitions d’entreprises proviennent de transmissions mal préparées). En effet, les règles juridiques de dévolution successorale ne contiennent quasiment pas de dispositions spécifiques aux entreprises. Les biens de l’entreprise sont inclus dans le patrimoine successoral transmis aux héritiers. Or, la transmission par décès aboutit le plus souvent à un morcellement de la propriété des biens successoraux, y compris ceux
de l’entreprise, dès lors qu’il y a pluralité d’héritiers. Il peut en résulter des divergences de position, voire des conflits, souvent préjudiciables à l’entreprise.
La connaissance des règles de transmission par décès permet de mieux appréhender la nécessité pour les chefs d’entreprise d’organiser leur succession et de préparer de leur vivant la transmission de leurs biens, ou tout au moins celle de leur entreprise, même pour ceux qui sont encore jeunes, personne n’étant à l’abri d’un décès accidentel.
Chefs d’entreprises, si vous n’exprimez pas votre volonté de votre vivant, c’est la loi, en l’occurrence le Code civil, qui fixera les règles de répartition des biens successoraux entre les membres de votre famille et ce, autour de trois grands principes.
Se fondant sur les liens du sang, la loi désigne précisément les personnes appelées à hériter en fonction du lien de parenté avec le défunt.
Les héritiers sont classés par ordre, au nombre de quatre :
1. les descendants (enfants, petits-enfants, arrière-petits-enfants…) ;
2. les ascendants privilégiés (père et mère), et les collatéraux privilégiés (frères et sœurs ou leurs enfants) ;
3. les ascendants ordinaires (grands-parents, arrière-grands-parents) ;
4. les collatéraux ordinaires (oncles, tantes, cousins).
La dévolution successorale a lieu dans l’ordre hiérarchique de ces quatre catégories. Si le défunt laisse des enfants, ce sont eux qui vont se partager la succession et qui vont évincer les autres ; en l’absence d’enfants ce sont les père et mère et les frères et sœurs qui vont hériter, et ainsi de suite.
Les enfants adoptifs, qu’ils aient fait l’objet d’une adoption simple ou plénière, ont les mêmes droits successoraux à l’égard de leur famille d’adoption que les autres enfants, légitimes ou naturels. Toutefois, en cas d’adoption simple, l’enfant adoptif n’est
pas réservataire à l’égard des ascendants de l’adoptant ; mais il conserve aussi ses droits successoraux à l’égard de sa famille de sang, ce qui n’est pas le cas pour les enfants adoptés de façon plénière (qui perdent tout droit successoral dans leur famille de sang).
À l’intérieur de chaque ordre, il existe des degrés, chaque degré représentant l’intervalle qui sépare chaque génération. Ainsi entre un père et un fils, il y a un degré (une génération). Dans chaque catégorie, l’héritier le plus proche en degré est appelé à succéder, à l’exclusion des autres. Par exemple, les petits-enfants n'héritent pas des grands-parents tant que les parents sont vivants.
Le conjoint survivant, qui n’a pas ce lien de sang est néanmoins considéré comme héritier par le Code civil. Il se verra conférer des droits plus ou moins restreints en fonction des héritiers avec lesquels il viendra en concours à la succession et de la présence ou non de testament ou d’une donation au dernier vivant.
- Si le défunt avait des enfants, la succession est partagée entre le conjoint survivant et les enfants.
- En l’absence d’enfant, le conjoint hérite de la succession qu’il partage avec le père et la mère du défunt s’ils sont encore en vie. Si tous deux sont décédés, il hérite de la totalité.
À noter : le partenaire de Pacs n’est pas un héritier. Pour avoir des droits dans la succession, il doit avoir été désigné dans un testament.
Si le défunt n’a aucune famille jusqu'au 6e degré, la succession reviendra en totalité… à l’État.
La loi a prévu des garde-fous pour éviter que certains membres de la famille ne soient dépossédés au profit d’autres, instituant au sein de la masse successorale :
La réserve correspond à la portion de la succession qui doit obligatoirement revenir à une certaine catégorie d’héritiers, dits « héritiers réservataires ». Ce sont en premier lieu les enfants ou en cas de décès des enfants, les petits-enfants. À défaut d'enfants ou de petits-enfants, le conjoint survivant est réservataire à hauteur du quart de la succession.
La quotité disponible correspond à la part d’héritage que vous pouvez transmettre librement et sur laquelle vous jouissez d’une liberté totale, à condition de prendre certaines dispositions de votre vivant (testament, donation).
Cette quotité disponible varie en fonction du nombre d’enfants, elle correspond ainsi :
- à la moitié des biens en présence d’un enfant,
- au 1/3 des biens en présence de 2 enfants,
- au 1/4 des biens en présence de 3 enfants ou plus.
Dès lors qu’il existe au moins deux héritiers, les biens successoraux tombent en principe en indivision entre eux. Les héritiers n’ont chacun que des droits correspondant à leur quote-part. La possession effective des biens se réalisera le jour du partage qui nécessitera l’accord de tous les intervenants. Cette situation est en général peu adaptée à la gestion d’une entreprise.
PAR CONSÉQUENT,
faute d’avoir manifesté votre volonté de votre vivant, les règles fixées par le Code civil s’imposeront à vos héritiers. Si vous souhaitez les modifier, les aménager, la loi vous en offre la possibilité, tout en précisant certaines limites.
En effet, plusieurs procédés de transmission patrimoniale existent notamment la donation entre vifs qui permet de transmettre de son vivant l’entreprise, sans contrepartie financière. Cette donation entraînera à la charge du donataire le paiement de droits de donation. La loi fiscale a beaucoup évolué ces dernières années afin de favoriser l’anticipation des transmissions à titre gratuit, sans attendre le décès de l’exploitant et ainsi renforcer la pérennité de l’entreprise.
Le pacte Dutreil en est l’exemple parfait puisque ce dispositif permet de bénéficier, sous certaines conditions, d'une réduction de 75 % des droits de mutation dus en cas de transmission de ses parts sociales par voie de donation entre vifs ou en cas de décès.
La réforme 2019 de la loi Dutreil transmission l'a notablement assoupli et les sociétés unipersonnelles (EURL, EARL, SASU, etc.) peuvent désormais en bénéficier également. Le souscripteur unique se trouve alors tenu d’assurer à lui seul le respect des conditions attachées au dispositif, notamment celles tenant aux seuils minimaux et à la fonction de direction (article 787 B du CGI).
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